Réaliser des effets spéciaux, de la science de pointe? Que oui! Pour le comprendre, il suffit de s’intéresser à l’un des trucages les plus communs au cinéma : la giclée de sang. Faire pleuvoir de l’hémoglobine façon Kill Bill exige la mise en œuvre de techniques très différentes de celles utilisées, par exemple, pour faire croire à une hémorragie interne. Vous savez, la mince coulisse de liquide rouge dévalant sur le bord de la bouche d’un acteur qui se «meurt»?
«La recette pour fabriquer le faux sang va changer selon le visuel recherché», illustre Christian Lemieux, associé et responsable de création chez Gentils Monstres, un atelier d’effets spéciaux de Montréal. Pour simuler des caillots, il serait par exemple possible d’ajouter du café soluble au mélange d’eau, de sirop de maïs et de colorant alimentaire. «Et si on veut faire un gros “splash” de sang, il faut recourir à des pompes, qu’on dissimule.»
Comme l’environnement change sans cesse sur les lieux de tournage, les professionnels en effets spéciaux doivent prévoir des plans A, B, C, D pour s’assurer de livrer la marchandise. C’est là qu’intervient la méthode scientifique – hypothèse, expérience, résultat, etc. «Je n’ai pas fait d’études postsecondaires, mais je suis un cartésien! Je fais de la science appliquée avec la motivation de savoir comment les choses fonctionnent», explique-t-il.
Ça tombe bien : les connaissances sont plus accessibles que jamais. En ligne, on trouve de nos jours une foule de contenus pour apprendre les trucs des maîtres, comme Stanley Wiston. «Nous nous spécialisons en décors immersifs, comme ceux que l’on retrouve dans les jeux d’évasion, précise Christian Lemieux. Ce marché est certes niché, mais nous y sommes seuls ou presque.»
C’est pour laisser libre cours à sa créativité que Christian Lemieux a démarré son entreprise il y a quelques années. D’abord travailleur autonome, il a fondé Gentils Monstres à la fin 2022 avec une équipe constituée en grande partie de pigistes. «C’est l’originalité qui permet de nous démarquer, pense-t-il. En même temps, il faut posséder de solides rudiments en chimie pour faire ce métier, ne serait-ce que pour réussir ses moules en silicone !»